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Grande salle polyvalente
Nous nous arrêterons sur la traversée des âges, des bébés aux anciens, en passant par les adolescents, les adultes, les parents. Il s’agira d’aborder les questions autour de la naissance, de la mort, de ses différents passages et des rites qui les accompagnent.
Nous interrogerons la place des morts et des vivants mais aussi des différentes formes de transmissions. Comment rêve-t-on les bébés, comment se sépare-t-on aux différents moments de notre vie : à l’adolescence, à l’âge adulte mais aussi quand on perd un proche?
1- Daniel COUM, psychologue clinicien, psychanalyste, Auteur, conférencier et intervenant en analyse des pratiques professionnelles et institutionnelles, Chargé d’enseignements en
psychologie clinique, psychopathologie et psychanalyse Brest
“ D’une culture à l’autre sans exil, une traversée bretonne des générations”
L’inscription culturelle d’une subjectivité désirante, telle qu’elle porte l’enfant, jusqu’à ce qu’à l’adolescence il en écrive une partition originale quoiqu’avec une gamme commune, cette inscription culturelle trouve à être malmenée lorsque l’exil provoque une double rupture dans la chaîne du tissu filial et dans la trame du tissu social.
Mais il est des histoires où le changement de culture se fait sans exil – si ce n’est celui de l’intérieur, intérieur d’une culture bafouée, dénigrée, violentée par effet de colonisation. Ce changement de culture arrache les sujets à leur histoire, à leurs coordonnées existentielles, à leur langue, à eux-mêmes. Les bretons en savent quelque chose pour en avoir fait, à leur corps et à leur cœur défendant, la douloureuse expérience. Si le processus de rattachement politique de la Bretagne à la France ne date pas d’aujourd’hui il a connu son apogée il n’y a pas si longtemps, de sorte que les grands-parents d’aujourd’hui sont également ceux dont les parents ont vécu, au plus près de leurs existences singulières, cette épreuve dont l’interdiction officielle, véhiculée par l’école, de parler la langue maternelle – le breton – constitua le fer de lance d’une arme redoutable. Elle instilla dans le cœur des enfants de l’après-guerre la honte d’eux-mêmes, de leurs parents, de leur culture, de leur langue. Ce ne fut pas sans conséquences, encore observables, sur la santé mentale d’une population. Tout se passe comme si le traumatisme du changement de langue et de culture avait traversé les âges. Et plus généralement, les enfants d’ici à et d’aujourd’hui sont également les héritiers d’un changement de culture dont leurs parents sont les agents, plus ou moins consentants. En rejetant tout assujettissement aux dogmes collectifs – profanes ou religieux – au motif de libérer les individus de toute autorité, les parents ont gagné en liberté – d’être, de vivre et d’éduquer leurs enfants, selon leur désir – ce qu’ils ont perdu en sécurité : l’angoisse, l’insatiabilité, la peur de l’avenir… tendent à prendre le pas sur la créativité, l’élaboration et l’altérité, ressources pourtant nécessaires à l’humanité.
Or ce désarroi ontologique des parents, donc de leurs enfants, trouve actuellement un écho mortifère dans le discours néolibéral qui l’exploite, l’entretient voire l’encourage, au profit du marché, dont la « novlangue » de la modernité est le véhicule. Car il ne s’agit pas tant, ici, de changer de langue que de bannir de la langue les mots dont la subjectivité se nourrit. Quand la langue est pervertie, quand les mots n’ont plus de sens, quand la parole doit être utilitariste, fonctionnelle, adaptée, ce n’est pas tant que l’on ne peut pas se comprendre, mais que le socle commun à partir duquel l’altérité, et le dialogue qu’elle permet, peut se déployer fait défaut. Aussi se peut-il que la colonisation des esprits et des corps dont il s’agit désormais, procède non tant d’un processus de « changement de culture sans exil » mais d’une négation de ce qui constitue la culture elle-même.
2- Claire MESTRE, psychiatre, psychothérapeute et anthropologue, CHU Bordeaux, Association Ethnothopies, rédactrice en chef de la Revue l’autre
“Œdipe sur la route”
Il s’agit à partir de la clinique de jeunes MNA, de réfléchir au mythe d’Oedipe et de l’interpréter de façon différente de Freud. En effet, des jeunes à travers leur souffrance et parfois leur délire, rapporte des bribes d’histoire coloniale violente qui leur ont été transmises. Elles posent la questions des transmissions transgénérationnelles mais aussi du héros Oedipe interrogeant ceux qu’il rencontre pour interroger ses origines et ce qui a pu induire un destin maléfique.
3- Fatima TOUHAMI, psychologue clinicienne à la maison des adolescents de l’hôpital Cochin, docteure en psychologie, coordinatrice des dispositifs thérapeutique et de médiation : NatMIE pour les mineurs non accompagnés et Med’Alliance, et Sevan MINASSIAN ,Pédopsychiatre, responsable médical du dispositif NatMIE pour les mineurs non accompagnés, praticien hospitalier à la maison des adolescents de l’hôpital Cochin, rédacteur en chef de la revue L’autre.
“Du thé et des makrouts : psychothérapie d’un marocain de la rue, La prise en charge des mineurs non accompagnés du Maghreb est devenue une vraie problématique tant institutionnelle que politique”.
Qui sont ces jeunes adolescents, enfants qui envahissent les rues de Paris, qui mettent à mal tout un système de protection de l’enfance, de prise en charge de la délinquance juvénile, la pédopsychiatrie, la médecine générale et l’addictologie.
Derrière cette figure de « l’Autre maghrébin », qui échappe et cristallise peur et passion, pouvons-nous en tant que soignant, accueillir malgré tout, sans contrainte pour soigner la vie, l’exil, la peur, le trauma, l’extrême pauvreté et le manque à être aimer.
Quelles autres réalités énigmatiques, la rencontre avec ce public dit de « mineurs marocains » vient-il nous proposer ? peut -être une autre lecture du monde, d’autres paradigmes pour un ordre du monde nouveau. …. Il était une fois, Rani un jeune marocain de Casablanca qui tomba amoureux de Solenn, si elle acceptait de l’épouser et de le rencontrer alors il serait sauvé… !
4- Christa ATTIVON, psychologue clinicienne, association Ethnotopies, Service de Médecine Transculturelle CHU Saint André Bordeaux
“Une traversée de lignée pour la vie”
Mots clés : Filiations, Rites, Rachat, Dation du nom, Mortalité infantile, Principe de vie
Venir au monde est une traversée du monde des entrailles maternelles vers le monde extérieur. Selon les considérations cosmogoniques des aires culturelles ouest-africaines comme au Togo, naître est une traversée d’un Être, un principe de vie, du monde invisible vers le monde visible des vivants. Dans certains cas, cette traversée n’est pas suffisante pour naître durablement à la vie. C’est le cas des mortalités infantiles successives, d’enfants âgés de moins d’un an, pour lesquelles il y a une identification locale de la cause et des rites. En effet, lorsqu’une femme fait l’expérience de pertes successives de ses nourrissons, l’hypothèse selon certaines croyances traditionnelles togolaises, est que la mort en a après cette descendance. La mort viendrait voler la vie de ces bébés. Partant de ce constat, il faut donc la tromper en rendant méconnaissable le prochain nouveau-né de cette femme. En général, après le deuxième ou le troisième enfant décédé un rite de protection est effectué par des personnes symboliquement porteur de vie. C’est un rite de passage d’une lignée à une nouvelle en vue de la sauvegarde de la vie des nourrissons. Tantôt c’est à une divinité que ce bébé est confié par conversion des parents, tantôt c’est un rachat de cet enfant auprès de sa mère et de sa lignée. Quelques cas concrets de passage symbolique seront proposés. Une réflexion sera exposée autour de ce qui constitue l’efficacité symbolique, porteur de pulsion de vie, dans ces situations.