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30 places maximum | Auberge de jeunesse
Les individus côtoient au quotidien le monde invisible. Ce monde peuplé d’être, d’esprits et d’ancêtres, frôle, rencontre, heurte le monde visible.
Certaines personnes seront touchées, vont être attaquées, aussi protégées …
Comment accéder au monde invisible pour remettre de l’ordre, pour réparer, pour soigner, pour interroger ?
Comment la culture pense ces chemins ? Quelles en sont les pratiques ? Comment la culture a balisé ces chemins pour parer au risque de transgression ?
Comment prendre en compte l’invisible dans notre approche clinique ? dans nos systèmes de soins et notre compréhension des symptômes ?
Les rituels, la transe,… sont autant de chemins qui permettent de passer d’un monde à l’autre.
1- Daniel DELANOE, psychiatre, anthropologue, unité mobile trans-culturel de EPSM Barthélemy Durand, Etampes, chercheur associé à l’INSERM, maison de Solenn.
“Le monde invisible au service des rapports sociaux de domination”
Mots clés : animisme, domination, individu, monothéisme, sorcellerie
La culture au sens large a de multiples fonctions au fondement de la vie sociale. Que ce soit la langue, la parenté, la culture matérielle, les systèmes symboliques et l’interprétation du monde, en particulier de la maladie et de l’infortune. La culture intervient aussi dans le maintien et la reproduction des rapports sociaux, lesquels sont toujours marqués par des rapports de domination, que ce soient du groupe sur l’individu, des hommes sur les femmes, des adultes sur les enfants, des classes dominantes sur les classes dominées. Dans certaines sociétés de chasseurs-cueilleurs peu hiérarchisées, le monde animiste semble plutôt accueillant comme chez les Pygmées Mbuti du Congo (Turnbull 1978). Alors que dans les sociétés hiérarchisées avec des chefs, des rois, des esclaves, des castes, des classes, le monde invisible est menaçant et violent, qu’il soit animiste, polythéiste ou monothéiste. Ainsi, dans les sociétés très hiérarchisées d’Afrique de l’ouest, et ailleurs également, les génies à l’affut prennent possession des humains et font leur malheur ; la sorcellerie est un moyen de contrôle social exerçant une menace permanente au sein de ces « univers communautaires animés par une logique totalitaire ne tolérant pas l’indépendance individuelle » (Alain Marie 2003).
Dans les religions poly- et monothéistes, la peur de l’enfer et de souffrances éternelles joue un rôle comparable (Greven 1992) et il faut, comme Abraham, s’incliner devant le pouvoir divin jusqu’à accepter de sacrifier son fils.
2- Léa EMO-DAMBRY, chargée de médiation de l’abbaye de Daoulas, Edith JOSEPH, chargée de conception des expositions de l’abbaye de Daoulas.
“La question des rituels mortuaires dans le cadre de l’exposition ou comment rendre l’invisible visible pour les visiteurs?”
Mots clés : exposition, médiation, intergénérationnelle, mort, autres mondes.
La question des rituels mortuaires dans le cadre de l’exposition ou comment rendre l’invisible visible pour les visiteurs ? L’Abbaye de Daoulas présente dans sa programmation culturelle des expositions visant à s’interroger sur le rapport à l’autre, aux autres, par le biais de l’anthropologie culturelle. En abordant des questions de sociétés ou des enjeux contemporains, nous souhaitons susciter chez nos visiteurs le désir d’interroger ses pratiques, de s’étonner et de se découvrir une relation insoupçonnée au monde. Nous proposons de présenter une analyse de cas à partir de notre prochain sujet d’exposition: le rapport des vivants à la mort et aux morts. Ce sujet, difficile au premier abord, permet de questionner les pratiques culturelles de tout un chacun face à l’invisible, voire l’indicible. Face à la conscience d’une finitude, l’individu se retrouve dépourvu et cherche un sens à cette fin inéluctable. Quelle que soit la culture, la pratique de rituels, organisés par étapes, tente donc d’apporter des repères et des réponses face aux questions suscitées par cette entrée dans un monde inconnu : Quel sens donner au départ d’un être cher ? Qu’est ce qui se passe après? Où va-t-on ? En quoi est-ce si important de donner une place aux morts pour (re)trouver sa place de vivant ? Selon un principe récurrent dans nos expositions, le discours rythmant le parcours est interrogatif plus qu’affirmatif, donnant à nos publics l’occasion d’affiner leur propre réflexion. Pour que chacun expérimente et s’interroge, l’exposition met à disposition des outils, des dispositifs et des médiations qui placent l’échange, intergénérationnel en particulier, au centre. Témoignages directes, échanges d’idées entre chercheurs, jeux interactifs autant qu’objets et textes rendent ainsi visible aux publics la façon dont les sociétés s’organisent pour donner du sens à un monde invisible, puisque au-delà des vivants.
3- Association I Carborani, association de musicien.es et danseuses de musique tradituionnelle du sud de l’Italie, Paris, Lanzilotti Cosima.
“Invitation à la transe ; le phénomène du tarentisme entre musique et danse”
Mots clés: Transe, tarentisme, Pouilles, pizzica, musique
Invitation à la transe : le phénomène du tarentisme entre musique et danse Italie, 1967. C’est l’époque du boom économique, des déplacements en vespas et des vacances dans la Riviera romagnole. On entend parler d’émancipation des femmes, de liberté sexuelle, et un vent nouveau semble souffler sur le Belpaese. En même temps, dans les Pouilles, et plus spécifiquement dans le Salento, il n’est pas rare que des femmes mais aussi des hommes, surtout au cours de l’été, soient piqués par une tarentule qui par son venin provoque des états de forte dépression, angoisse, et mélancolie, en plus de catatonie, de délires et de douleurs musculaires. C’est ce qu’on appellera le Tarentisme (De Martino, 2009). Pour guérir, les femmes et les hommes piqués doivent être soignés par une musique effrénée, sous le rythme pressant des guitares et les battements puissants des tambourins. Probablement, les éléments musicaux de répétition, d’augmentation du tempo ou de volume sonore, mènent à un état de purification et de catharsis. Le passage du monde visible à l’invisible, qui attendait toujours l’été pour se manifester, se fait donc par la morsure d’un animal, à savoir une araignée. Ce prétexte permet aux souffrances du monde invisible et de l’esprit – dues notamment aux pressions et aux urgences de la vie quotidienne et de la société – de devenir visibles et de se manifester par le corps. En quelque sorte, il les met en scène, il leur confère le droit d’existence. Le résultat est une chorégraphie tout à fait unique, tout comme la souffrance de chacun.e de nous. C’est ce qu’on appelle pizzica tarantata. Notre association – formée par de jeunes musicien.nes et danseuses – vous invite à comprendre les enjeux de cette transition du monde invisible au monde visible. L’atelier que nous proposons se développera autour d’une introduction anthropologique du phénomène du Tarentisme, puis nous proposerons une idée de ce qu’a pu être le rituel jusqu’à arriver à la danse actuelle développée autour de cette musique. Nous conclurons l’atelier par une invitation à danser !
4- Marco LEOTTA, doctorant en anthropologie culturelle et sociale à l’université de Milan Bicocca Marco Leotta, membre du laboratoire Mondi Multipli de l’Université de Gênes.
“Divination Ifa au Benin : négocier les seuils entre visible et invisible”
Mots clés: Divination – Seuils – Visible et invisible – Anthropologie – Bénin
Divination Ifá au Bénin: négocier les seuils entre visible et invisible Les pratiques divinatoires permettent aux individus et aux communautés de gérer les relations avec la pluralité de l’existence, de faire face au désordre, de trouver protection, soin et satisfaction. En d’autres termes, ce sont des pratiques vitales pour que la réalité puisse être continuellement comprise, négociée, signifiée, habitée et transformée. Dans le centre-sud du Bénin, la divination Ifá (ou Fa) est l’une des principales ressources dans la gestion des crises ; en effet, la divination, en tant que pratique de connaissance, est largement impliquée dans le domaine des soins, et son effet thérapeutique consiste à redonner à la personne en crise la capacité d’agir dans le monde, en réhabilitant son élan vital hors de la situation de stase dans laquelle elle se trouve. Cette pratique divinatoire se situe sur le seuil entre les mondes, et puisque les signes de l’invisible peuvent se manifester dans le visible, l’acte de leur dévoilement se produit précisément dans la divination, entre l’ordinaire et le non-ordinaire. En d’autres termes, la logique transformatrice de la divination est au centre d’un travail poïétique de négociation dans lequel sont canalisées les instances et les intentions de la pluralité des sujets visibles et invisibles impliqués dans une dimension de sens. À travers une perspective anthropologique, des exemples ethnographiques tirés de ma recherche de terrain au Bénin et de la littérature sur le sujet, cette contribution propose une réflexion sur la divination comme pratique de négociation entre le visible et l’invisible, en se concentrant sur les processus de médiation, de gestion de crise et de co-construction des savoirs.