[formidable id=3]
30 places maximum | Salle du conseil municipal
Notre langue, ancrée dans une culture, nous structure et fait repère. Elle permet de dire les émotions, d’avoir recours à des métaphores propres et de nous accompagner dans nos relations aux autres. Nous ne disons pas les mêmes choses dans notre langue maternelle et dans une autre langue.
Nous réfléchirons à la question des langues, du plurilinguisme mais aussi à tout ce qui peut soutenir le passage d’une langue à l’autre. Notamment comment les interprètes dans leur rôle de médiateurs nous aide à construire un pont entre deux mondes mais aussi permettent de rendre explicite l’implicite, de travailler sur les malentendus.
1- Guillaume WAVELET, psychologue clinicien, Maison de Solenn, doctorant, université Paris Nanterre
“D’un monde à l’autre, à la lisière des langues : l’expérience vécue des interprètes médiateurs”
Mots clés: traduction, interprétariat, médiation culturelle, lisière, histoire collective et individuelle
Comment pourrions-nous figurer la posture si particulière des interprètes-médiateurs ? Elle semble en effet protéiforme et renvoie autant à l’entre-deux qu’à la traversée. Les interprètes-médiateurs sont à l’interface de deux entités, deux langues, deux cultures, et en même temps ils habitent pleinement chacune des deux. Par ailleurs, ils incarnent un mouvement de traversée et de transformation, faisant passer un élément d’un contexte à un autre, en lui restant fidèle mais aussi en acceptant la part de transformation inhérente à ce processus. Nous nous demanderons comment décrire l’espace de lisière dans lequel ils se situent, une lisière « qui sépare et réunit en même temps », pour reprendre l’expression du poète et traducteur Emmanuel Hocquard. Nous ancrerons cette réflexion dans l’analyse d’entretiens de recherche réalisés avec des interprètes-médiateurs, selon une méthodologie qualitative inductive. Notre démarche vise en effet à rendre compte de leur expérience vécue, de la façon dont eux-mêmes donnent sens à leur profession et à son inscription dans leur parcours de vie. Ainsi, depuis leur discours, nous montrerons comment ils s’appuient sur des valeurs humaines telles que l’empathie et la neutralité, qui sont elles-mêmes en demande de traduction, c’est-à-dire d’élaboration à partir de malentendus, sans quoi elles risquent d’entrer en conflit. Nous proposerons également une réflexion sur la façon dont les interprètes, « en passant par la médiation », parviennent à « décoder ce qui est dit derrière », pour citer leurs propos. Au-delà de la traduction des énoncés, ils prennent en effet en charge la révélation des contextes culturels et sociaux qui permettent l’énonciation des discours, ainsi que des intentions individuelles exprimées dans le verbal et le non-verbal. Enfin, nous évoquerons les différents « rôles » que doit jouer l’interprète, en postulant que cette notion est en fait trompeuse. Il semblerait plus pertinent de lui préférer une description des modalités d’alliance et de conflit au sein des configurations interlocutives propres à chaque dispositif d’interprétariat, ce que nous tenterons de démontrer.
Matériel: j’aurai un support PowerPoint et simplement besoin de pouvoir le projeter.
2-équipe consultation transculturelle La Pirogue, hôpitaux de St Maurice et hôpital d’Orsay Sarah DAOUDI, psychologue, bilingue en LSF, Paris
“Qu’est ce qui fait rencontre et accueil de l’étranger, dans sa langue et sa culture, quand cet étranger est Sourd ? “
Mot clés : Clinique transculturelle, surdité, langue orale, langue des signes, double traduction
La clinique transculturelle nous a appris à soigner l’étranger en prenant en compte sa langue et sa culture. Ce à quoi notre équipe de pédopsychiatrie l’UTES (Unité Thérapeutique Enfance et Surdité) ajoute la surdité. Ces rencontres bouleversent nos repères de thérapeutes et ouvrent à des nouveaux horizons. Notre clinique de « Culture Entendante » devait créer quelque chose qui n’existe pas, un lieu mouvant, une enveloppe mobile pouvant tenir face au tangage du contre-transfert complexifié par la langue des parents, leur culture d’origine, la langue des signes et la culture Sourde.
C’est ainsi qu’est née la Consultation Transculturelle nommée La Pirogue. Ce dispositif pionnier accueille depuis 2 ans et demi, une mosaïque culturelle, dont la scène thérapeutique nécessite un double interprétariat, invite un patient et sa famille touchée par la surdité à rencontrer, une équipe représentant une famille de thérapeutes, dans le déploiement d’une chorégraphie sonore et gestuelle. Il est bien question d’une navigation face à la surdité, qui révèle une altérité nécessitant un décentrage de la prétendue « norme ». « La Pirogue » amène la clinique à se renouveler dans cette traversée du transnorme et invite au mouvement de désencrage sensoriel et culturel. Comment accueillir, cette altérité entre culture, handicap et identité : la SURDITE, autrement qu’en décolonisant nos certitudes ?
Nous vous proposerons d’embarquer à bord de notre Pirogue à travers deux vignettes cliniques, où des objets créés, trouvés : voile, portable, implant cochléaire, deviendront des objets transitionnels. Mais aussi, des clés permettant d’un monde à l’autre, de se relier et de se transformer, comme les signes providentiels d’une métamorphose, approchée à fleur de peau, geste et signes au fil de l’Autre…
3-Marie-Linda CHAPALAIN, cadre socio-éducatif au CMPEA du Tampon, Ségolène MEYSSONNIER, psychologue clinicienne, CHU La Réunion
“Le Fonnkèr à l’île de La Réunion : une poétique de la relation en milieu carcéral”
Mots clés : fonnkèr, poésie créole, milieu carcéral, prévention de la radicalisation violente, île de La Réunion, anthropologie langagière, recherche-action.
La langue créole réunionnaise est le fruit d’un mariage des cultures issu d’une société créole de plantation construite dans la douleur et la souffrance (Médéa, 2003). Bien que longtemps méprisé par le pouvoir colonial français, cet héritage linguistique est à l’origine d’une tradition poétique aujourd’hui renouvelée à La Réunion. Le fonnkèr (« Fond du cœur ») est un art poétique créole dont les mots expriment à travers une langue maternelle une palette d’émotions et de non-dits plus difficilement exprimables en français. Le fonnkèr prend alors la forme d’un objet de médiation qui cherche à faire taire, à prévenir et à soigner les maux en émancipant ceux dont la condition humaine est fragilisée (Glâtre, 2020).
L’objectif de notre communication est d’interroger l’intérêt et le rôle de la création de fonnkèr par une population de détenus créolophones incarcérés dans une maison d’arrêt à La Réunion.
L’approche méthodologique s’articule autour d’une recherche-action toujours en cours qui utilise l’apport réflexif de l’anthropologie langagière en société créole réunionnaise (Marimoutou, 2014). Nous avons mené quatre ateliers d’écriture sur la période du mois de décembre 2022 auprès de huit détenus. Ces ateliers d’écriture s’inscrivent dans un dispositif de prévention de la radicalisation violente organisé par le ministère de la justice. La première partie de nos données de terrain se compose de fonnkèr créés par les détenus. La seconde partie comporte les corpus des entretiens libres et des échanges prenant la forme de débats sur le contenu des fonnkèr nouvellement écrits ou oralisés par les détenus.
Nos résultats montrent d’abord des détenus exprimant l’intérêt de la composition de fonnkèr pour exprimer des états de colère et l’expression d’injustices. Nos données soulèvent également l’intérêt du fonnkèr pour la compréhension des détenus et la prévention des formes de violences en détention.
4- Amalini SIMON, psychologue clinicienne, PhD, hôpital Cochin, hôpital Avicenne, Dalila Rezzoug, Pédopsychiatre MCU-PH, Hôpital Avicenne, Université Paris 13,
“L’Elal d’Avicenne : la traversée des langues”
Mots clés: Plurilinguisme, ELAL d’Avicenne, évaluation, contre-transfert langagier
Dans notre société qui est traversée par une pluralité de langues, il devient de plus en plus difficile de considérer qu’il n’y a que le français en France !
Aujourd’hui les enfants arrivent avec une ou plusieurs langues autre que le français et souvent les professionnels qui les accueillent ne sont pas formés, ni prêt à accueillir ces langues. Ils ne savent pas comment les valoriser, les intégrer dans l’accueil des enfants dans leurs différents lieux: l’école, l’hôpital, l’aide social à l’enfance etc.
Malheureusement ces langues sont vécues comme des obstacles empêchant la rencontre alors qu’elles sont une richesse qui permettent au contraire un socle nécessaire pour bien grandir! Cet Autre ici, incarnée par la langue, vient faire peur car nous ne le maîtrisons pas et de ce fait nous lui accordons des places parfois violentes.
Grâce à l’Elal d’Avicenne, un outil d’évaluation langagière nous avons accès à ces langues. Cet outil indispensable pour prendre en compte les langues qui entourent l’enfant nous permet d’avoir accès à cette langue. L’interprète est au cœur de cet outil, et le professionnel demandeur de l’évaluation doit se laisser porter par cette langue qui lui est étrangère. Dans cette présentation nous aimerions, à partir des audios dans plusieurs langues, partager et faire vivre ce qui nous traverse quand on est face à une langue que nous ne connaissons pas. A partir de la notion du contre transfert langagier, nous nous laisserons embarquer dans la traversée des langues. Cela nous permettra aussi de réfléchir à ce qu’entendent les parents quand les enfants parlent cette langue maternelle. C’est donc à la fois questionner ce qu’entend les professionnels et les parents autour du langage de l’enfant dans les différentes langues.